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 Les pierres qui parlent

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Anne
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Anne


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Date d'inscription : 19/01/2006

Les pierres qui parlent Empty
11112009
MessageLes pierres qui parlent

Les cailloux nous jouent des tours, ils sont comme les nuages, ont y voit toutes sortes de choses, des visages, des formes, chaque promeneur pose un regard différent tout est fonction de sa vision imaginaire.


Les pierres qui parlent P1060110
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Les pierres qui parlent :: Commentaires

Pascal
Re: Les pierres qui parlent
Message Mer 11 Nov - 18:32 par Pascal
Un cri de pierre resté figé, comme la victime d'un charme en montagne...
Anne
Re: Les pierres qui parlent
Message Mer 11 Nov - 18:42 par Anne
C'est ce que je vois moi aussi, un visage qui se fige et se transforme en pierre. Tu sais un peu comme ces corps momifiés que l'on retrouve des milliards d'années plus tard, leur cri saisi dans la pierre, ou dans la lave durcie....
Pascal
Re: Les pierres qui parlent
Message Mer 11 Nov - 18:44 par Pascal
Que pouvait penser la femme de Pompéi, un matin comme si c'était le dernier, cela me rappelle une nouvelle écrite il y a quelques années, Aube du 6 août, je vais essayer de la retrouver, tiens...
Anne
Re: Les pierres qui parlent
Message Mer 11 Nov - 18:48 par Anne
Oh oui et met la ici, ce serait une belle façon d'illustrer cette photo...
Pascal
Re: Les pierres qui parlent
Message Mer 11 Nov - 18:50 par Pascal
je fait celà...
Pascal
Re: Les pierres qui parlent
Message Mer 11 Nov - 19:00 par Pascal
Aube.



Elle s’étira et son premier souhait fut : « Pourvu qu’il ait pensé à moi. »
Elle avait passé la nuit à déambuler. Elle resta appuyé au parapet, le
regard posé sur la rue endormie. Les nuées s’obstinaient à rosir dans
la lueur irréelle et tremblotante qui irradiait de l’horizon incertain.
Le frémissement des cerisiers n’était altéré que par le souffle du vent
salin.
Elle examina les alentours. Il y avait de petites échoppes
disséminées un peu partout. Eclairées par de minuscules lanternes,
adossées les unes aux autres, rampantes jusqu’au milieu de l’avenue.
Certaines enveloppées d’une odeur de poisson séché. Quelques unes
d’entre-elles étaient déjà ouvertes.
Elle se pencha sur le côté et
les souvenirs qui assaillirent sa mémoire la firent sangloter. Elle
ferma les yeux et les tint ainsi quelques minutes, pour mieux se
rappeler. Enfin, elle consentit à affronter la réalité. Sa main, à la
recherche d’un mouchoir, explora l’intérieur d’un petit sac à main posé
sur la tablette, il venait de Tokyo, un présent du passé…
Perdue dans ses pensées, elle regarda de nouveau la rue, apercevant les acteurs du matin s’animer…
Hiroshi et Tomoko pressés courant tous les deux… Tamiko traînant les
pieds dans la poussière, son visage allongée, comique jusque dans la
détresse.
Daisuké et Michiyo riant à gorges déployés sous un
réverbère clignotant et jaunâtre. Hurlant des plaisanteries obscènes…
D’autres encore, dans le lointain…
Dans l’air frais de l’aube, le son clair et pur du bonheur…
Elle salua de la main et la boule de sa gorge disparût pour un temps.
Elle sourit machinalement et regarda son reflet dans l’éclat pâle de la
fenêtre entrouverte. Soupira de nouveau.
« Yôko, chère âme,
Je suis pilote maintenant. Mon instruction, bien que rapide, est
terminée. Ne me laisse pas quitter ce monde sans avoir revu ton cher
visage. Je te prie. J’ai fait passer cette lettre par un camarade. Elle
est courte car je risque gros…
Ton Yoshio »
A l’approche
du matin, le ciel devint encore plus majestueux. Sur son balcon, Yôko
n’en perdait pas une miette. Même si l’empire était perdu, les dieux
avaient décidé de parer les vaincus de costumes magnifiques…
Sa
mère se levait. Avant de préparer le thé, elle allait lui demandait de
prier avec elle pour tous les fils du Soleil Levant éloignés de leur
maisons.
Yôko pensait à l’année précédente. A la promenade au Lac des Carpes, aux serments échangés pour… Après…
Tout cela semblait très loin. A croire que cela n’était jamais arrivé.
Que ce qu’elles vivaient toutes les deux était un été comme les autres.
S’il n’y avait régulièrement ces vagues rumeurs qui arrivaient par
voisins interposés comme l’écho incertain d’une défaite radicale…
Dans le jardin d’hiver que baignait une clarté mauve et rosée, elle se
sentit envahie par une impression de totale sérénité tandis que sa mère
versait le thé, précautionneusement… Depuis plusieurs années, il était
rationné.
Elle caressait des yeux les portraits de ses frères et de son père qu’elle ne reverrait jamais…
Elle ne cessait de penser à Yoshio sur son aérodrome de l’île de Guam, ou ailleurs, plus personne ne savait rien…
Elle ouvrit la porte du jardin et jeta un coup d’œil à l’extérieur.
Elle regarda longuement les hautes tiges de bambous se balancer dans
l’air suave.
Elle contempla sa mère, toujours affairée.
- « Crois-tu qu’ils sont… »
- « Paisibles… » Acheva, celle-ci
- « Pourquoi ne lui ai-je pas dit ? Comment ai-je pu le laisser partir sans rien dire ? »
- « Yôko, chacun d’entre-nous doit choisir son instant et son lieu.
Personne ne peut imposer sa conduite à autrui. Ce n’était pas le
moment, peut-être… »
- « Maman, est-ce que tu crois que tout cela finira ? »
Les bras ballants, la mère de Yôko semblait si lasse… Résignée à tout…
- « Qui peut le savoir… Une ère touche à sa fin … Je le sens, c’est
dans l’air, imperceptible… Mais là… Allons nous asseoir sur le banc de
ton père… Dit-elle »
Côte à côte, elles traversèrent le jardin
silencieux. Elles s’installèrent toutes deux sur le siège de teck pali
par l’usage…
- « Maman, dit Yôko au bout d’un moment. Nous n’avons
jamais parlé de religion ? Est-ce que cela t’ennuie ? »

La
mère, jeune encore, mais déjà flétrie par le chagrin de chaque jour
tourna la tête vers elle. Son expression prit une coloration
merveilleusement douce dans les pastels de l’aube…
- « Il n’y a nul
besoin de parler de ces choses, ma chérie… Nous sommes ensemble, à nous
souvenir, là est l’essentiel, cela fait partie des choses que l’on
n’écrit pas… La vie sensible est silencieuse… Et si précieuse… »
Et ce fut tout. Ils se regardèrent, mutuellement émerveillées par leur confiance et leur force.
- « Fais toujours ce que tu juges le mieux… »
- « Aujourd’hui, je vais rester avec toi… »
Elles restèrent quelques instants sans parler, puis Yôko déclara :
- « Quelle journée magnifique… »
- « Oui, les dieux offrent une scène grandiose aux actes de nos vies. »
Yôko eut une angoisse diffuse. Elle passa un bras autour des épaules de sa mère et se laissa aller contre elle.
Elles étaient assises là, dans la lumière naissante de l’aube. Le
soleil se levait sur Hiroshima ce 6 août 1944 pour la première fois… A
8 heures 14, l’horizon s’embraserait une seconde fois…
Anne
Re: Les pierres qui parlent
Message Jeu 12 Nov - 17:45 par Anne
Magnifique ce texte.
Pascal
Re: Les pierres qui parlent
Message Jeu 12 Nov - 17:54 par Pascal
Merci...
Re: Les pierres qui parlent
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