Un rai de lumière s’attarde sur ton sein velouté, s’alanguit ; le jour entrouvre ta chemise ; l’heure exquise s’étire de ton ventre rond jusqu’au bout de tes pieds en mille fourmillements. Sous la couette.
Le sommeil réclame encore un peu de temps, si peu, quelques minutes entre deux eaux, complice de ta chair, il s’arrange de cette demi - conscience, où la vague demeure suspendue
Vas – tu ouvrir les yeux à l’ombre hospitalière, te rendre à ses soupirs, feindre d’en être la prisonnière ? L’idée est séduisante qui te rend hésitante, mais cette volupté s’effondrera, tu le sais bien. La tentation épuise et l’attente tue, tu le sais bien. Comme il ne sert plus que l’espérance te berce d’illusions : sa place est vide. Et si froide ! Il n’est plus.
Pourtant, plus têtue que têtue, tu animes son souvenir, son visage parfait, son regard magnétique, ses longs doigts pianotant les gammes de ton corps. Puis son odeur que tu humes comme une chienne, la sienne et la tienne, la vôtre : lave divine de ce volcan en ton calice secret
Une allégresse soudaine ruisselle sans mystère ton désir de vivre et tu hurles de joie autant que de douleur. C’est trop ! Trop fort ! Et tu fermes les yeux !
Aller le retrouver te propulse hors du lit : « Se souvient – il de moi, de mes gémissements couvrant son feulement ? Il faut dire que je freinais son impatience quand, aujourd’hui, je le prendrai comme seule une folle peut le faire.
Tu tires les rideaux sur cette réminiscence et la lumière t’aveugle. Alors fermant les yeux, les mains serrées sur la soie impudique d’une enveloppe fragile, tu brûles intensément du tourment sans cesse renouvelé de tes sens à vif.
Les mots chavirent dans ta tête, des flots de sentiments t’emportent, t’arrachent des larmes, lancent des s. o. s, supplient l’amour de t’offrir d’autres rivages.
Puis tu naufrages dans le petit nuage de lait que tu as ajouté dans ton café. Tu bois la tasse, la repose sur la table basse. Et tu pleures encore d’une émotion étrange : « C’est si loin, et pourtant comme hier. Quand même, je t’aime, toi qui courait légère sur les plages du Nord en toute liberté ! Va petite, ne t’arrête jamais, l’amour a ses saisons et il est en chemin »
Alors à nouveau devant ta fenêtre tu donnes du temps au jour qui vient.
Pierre WATTEBLED - www.pierre-wattebled.fr.tc
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