Ce nom ne vous dit rien, il est décédé voilà deux ans.
Il n’est jamais venu sur ce forum. c’était mon ami, même un peu plus, une sorte de grand frère il avait dix ans de plus que moi. J’ai envie de vous raconter sa vie, enfin ce que je sais, bien peu de chose, connaît-on vraiment les gens.
A son enterrement sa fille n’est pas venue, c’est chère un billet d’avion, son fils oui, il croyait que la maison appartenait à son père, il aurait fallu la vendre. Je ne juge pas, je constate.
Toute une vie, qu’est-ce ? pour beaucoup heureusement en occident un « long fleuve tranquille », pour d’autre tout commence mal, pour lui, tout, toujours de travers.
Il était né en 1942 en Palestine, je dis Palestine car l’état d’Israël n’existait pas encore, la Palestine était sous mandat britannique, d’une mère italienne et d’un père soldat, père qu’il ne connaîtra pas, la grande faucheuse étant passée par là.
J'avais tout juste dix-huit ans quand je l’ai rencontré, j’étais un jeune bachelier en rupture de rang et lui un cameraman de presse dans un pays alors oublié du monde mais bien trop connu aujourd’hui des JT du soir.
Nous nous sommes retrouvés dix ans plus tard à Paris lui dirigeant un petit atelier et moi travaillant dans le même quartier. Nous prîmes vite l’habitude de déjeuner ensemble le midi dans tout les troquées du quartier, nous aurions pu écrire un guide gastronomique des restos les plus crades du 18e.
La 1er guerre du golfe n’a pas fait des victimes que là-bas, une crise économique parcourue Paris et nous voila tout les deux sur le carreau. Il devint chauffeur d’un député, celui-ci trouva l’épouse de son chauffeur à son goût, oserai-je dire que les femmes préfèrent la couche des notables. Il disparut pendant deux ans avant de me téléphoner pour me proposer un voyage en Roumanie, il avait récupéré un bloc opératoire à Genèvre pour une ONG qui voulait le convoyer en Roumanie. Une chance pour moi, je n’ai pas participé à l’opération, elle tourna au cauchemar. Ils avaient décidé de traverser l’ex-Yougoslavie alors en guerre. Arrêté, il vécut un simulacre d’exécution dont il ne se remit jamais. Au bout du rouleau, malade et psychiquement très marqué il s’installa en 2000 dans une petite maison que j’avais dans le sud de l’Aveyron.
Merci d’avoir lu ce texte.